Article de Fabrice Pouliquen – 20mn. L’OPEN sort ce lundi une étude sur le porno et les ados

à la veille d’une réunion de travail, au ministère de l’enfance, pour plancher sur des solutions techniques empêchant l’accès de sites X aux mineurs…

Toujours plus nombreux et un peu plus jeune encore. La pornographie continue de s’immiscer dans le quotidien des adolescents. La moitié des adolescents (51 %) âgés de 15 à 17 ans admettent avoir déjà surfé sur un site pornographique, selon une étudeIfop pour l’ Observatoire de la Parentalité et de l’Éducation Numérique (Open). C’est 14 points de plus par rapport à une précédente enquête réalisée en septembre 2013. La première visite sur un site pornographique se fait quant à elle à l’âge de 14 ans et 5 mois, trois mois plus tôt qu’en 2013.

Les filles « rattrapent » leur retard

Dans le détail, près de deux garçons sur trois (63 %) ont fréquenté au moins une fois un site X. C’est toujours plus que les filles (37 %). Mais l’étude observe un « rattrapage » du genre féminin en la matière. La proportion de jeunes filles ayant déjà visionné un film X a plus que doublé en quatre ans.

Une progression marquante et révélatrice pour François Kraus, directeur du pôle Actualité de l’Ifop. « On l’explique par l’évolution des supports d’accès à Internet. Il y a une dématérialisation de plus en plus forte de l’accès au porn. Une désaffection de la télévision au profit des sites Internet.

Une consommation qui se dématérialise

La consommation de pornographie par les ados se fait pour l’essentiel aujourd’hui via des sites streaming gratuits. Ils sont consultés principalement sur smartphone. 40 % des garçons ayant déjà consulté une vidéo porno l’ont fait sur leur téléphone contre 26 % des filles. C’est loin devant l’ordinateur portable (35 % et 20 %), l’ordinateur de bureau (21 % et 8 %), la tablette (20 % et 6 %). Seuls 9 % des garçons et 6 % des filles ont visionné du porno sur une chaîne de télévision.

« L’accès au porno est désormais plus simple, plus discret, » note alors François Kraus. « Il n’y a plus besoin d’entrer dans une démarche proactive qui consiste à entrer dans un vidéoclub et d’acheter un produit. »

Un ado sur deux tente de reproduire des scènes vues dans des films

Inquiétant ? « Ce n’est pas tant la question, estime Thomas Rohmer, président de l’Open. Il faut d’abord se demander pourquoi ils vont sur ce type de contenu ? La raison est simple : l’adolescence est une phase de questionnements et les adultes, qui sont censés répondre à leurs questions, peinent à s’emparer des sujets liés à la sexualité. Du coup, ces ados vont chercher les réponses par eux-mêmes. »

C’est l’un des enseignements que tire l’enquête : la pornographie joue un rôle important dans l’apprentissage de la sexualité des jeunes. 45 % des adolescents sondés l’affirment en tout cas. Surtout, près d’un jeune sur deux a tenté de reproduire des scènes vues dans des films pornographiques.

« Ce serait dommage que le porno devienne une norme de fonctionnement définissant les relations entre une fille et un garçon, estime alors Thomas Rohmer. Le X reste un genre fictionnel. Ce n’est pas la vraie vie : il y a du trucage, du montage, du maquillage, certains acteurs prennent certains produits… »

En quête d’une solution technique

L’OPEN ne prône pas pour autant l’interdiction du porno sur Internet. Il appelle bien plus à la responsabilisation des diffuseurs de contenus pornographiques et à trouver une solution efficace pour empêcher l’accès des mineurs à ses sites. L’outil législatif existe déjà. C’est l’article 227-24 du code pénal qui puni la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, d’un message à caractère pornographique à un mineur de trois ans d’emprisonnement et de 75.000 euros d’amende.

« Cette loi est difficilement applicable sur Internet, explique Thomas Rohmer. « La majorité des sites X sont hébergés à l’étranger. C’est d’une solution technique dont nous avons besoin aujourd’hui. »

Ce sera l’enjeu d’une réunion, ce mardi, d’acteurs économiques, associatifs et institutionnels impliqués sur ce sujet, voulue parLaurence Rossignol, ministre de l’enfance, dans le cadre de son plan national des violences faites aux enfants. « Elle débouchera sur la création d’un groupe de travail chargé d’identifier des solutions et de réfléchir à leur mise en application », reprend Thomas Rohmer.

Exiger le numéro de carte bleue avant d’accéder aux sites ?

Parmi les pistes d’ores et déjà évoquées figurent notamment l’idée, évoquée fin février par Laurence Rossignol, de demander le numéro de carte bleue de l’Internaute pour accéder à du contenu pornographique pour s’assurer qu’ils s’agissent d’un adulte.

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