La récente arrestation du PDG de Telegram, Pavel Dourov, a ravivé les discussions autour des dérives liées à l’utilisation de cette plateforme. Parmi les motifs d’arrestation figure « la complicité de diffusion en bande organisée d’images de mineurs présentant un caractère pédopornographique ».
Car oui, si Telegram est apprécié pour sa politique garantissant protection de la vie privée et liberté d’expression, il est aussi devenu un espace où prolifèrent des contenus pédocriminels, échappant aux régulations classiques auxquelles sont soumis les autres réseaux sociaux.
En France, plusieurs affaires ont mis en lumière l’utilisation de Telegram par des réseaux pédocriminels. En 2021, une enquête menée par l’Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l’information et de la communication (OCLCTIC) a abouti au démantèlement de plusieurs groupes fermés sur la plateforme, où étaient échangées des images à caractère pédopornographique. Ces affaires ont révélé la facilité avec laquelle ces groupes échappent à la surveillance des autorités, profitant du cryptage de bout en bout et des canaux privés proposés par Telegram.
La particularité de Telegram réside dans son système de cryptage des conversations et la possibilité de créer des groupes ou des chaînes de diffusion presque invisibles pour le grand public. Cela offre une grande liberté à ses utilisateurs, mais aussi une protection pour ceux qui cherchent à contourner les lois. Cette liberté a permis à certains utilisateurs de former des communautés criminelles où s’échangent des contenus pédopornographiques en passant sous le radar des autorités.
5% des 7-10 ans utilisent régulièrement Telegram
Une tendance préoccupante montrée par les premiers résultats de notre dernière étude « Parents, Enfants & Numérique », réalisée en collaboration avec l’Ipsos. L’intégralité des résultats de cette enquête sera publiée prochainement, mais nous pouvons déjà révéler que 5% des 7-10 ans et 8% des 15-17 ans déclarent utiliser régulièrement ce réseau social. Des chiffres qui ne font que confirmer les failles en matière de régulation et de protection des enfants dans les espaces numériques.
Face à ces constats, il semble urgent de repenser l’accompagnement des enfants dans leur utilisation d’internet en incluant les adultes dans cette démarche. Accompagner les enfants dans les espaces numériques sur la base d’un cadre éducatif cohérent demeure la gageure des éducateurs. Cela passe parfois par des interdits nécessaires, mais avant tout par un dialogue renforcé.
Éduquer : c’est dialoguer et protéger
Depuis le 7 juillet 2023, la loi française établit la majorité numérique à 15 ans. En principe, avant cet âge, un enfant ne peut pas s’inscrire seul (sans le consentement de ses parents) sur un réseau social. Cependant, malgré les efforts du législateur pour mieux encadrer l’accès des mineurs à ces plateformes, ces règles sont régulièrement contournées. Les dispositifs légaux et techniques visant à protéger les plus jeunes ne sont ni infaillibles ni incontournables. Ainsi, la vigilance des adultes (parents ou professionnels) s’impose pour accompagner et encadrer les enfants dans leurs usages du numérique.
Il est essentiel de s’intéresser aux applications investies par les enfants ainsi qu’à l’utilisation qu’ils en font. Comme vous le feriez pour n’importe quel autre enjeu éducatif, discutez avec eux de leurs centres d’intérêt et initiez-les dès le plus jeune âge aux bonnes pratiques. En ouvrant des espaces de dialogue et en vous intéressant aux activités numériques de votre enfant, vous serez plus à même de repérer une situation à risque et d’en prévenir les conséquences.
En tant que parents et/ou professionnels de l’enfance, il est important de se rappeler que vous n’êtes pas seuls face à ces défis. Il existe une multitude de ressources pour vous accompagner dans l’éducation numérique de vos enfants, l’OPEN met notamment tous types de supports à votre disposition : articles, vidéos, podcasts… Pour vous donner des clés d’accompagnement et vous aider à réinvestir cet enjeu éducatif.
Aussi, bien qu’ils ne se substituent pas à un accompagnement parental, des outils de contrôles parentaux existent. Dans un premier temps, ils peuvent vous aider à mettre en place des règles permettant d’encadrer les activités numériques de votre enfant mais aussi à amorcer un dialogue ô combien nécessaire concernant les pratiques numériques familiales.