1500 avant 5 ans ! C’est le nombre alarmant de publications de photos d’enfants par leurs parents sur les réseaux selon certaines études. Quels sont les risques ?

Souris un peu … Papa veut des likes sur Facebook

Nous sommes très fiers de nos enfants et c’est vrai qu’ils sont adorables. Leurs bouilles pas possibles, les petits instants magiques du quotidien… Il est très tentant d’en garder la trace et de les partager avec d’autres.

Mais il faut bien comprendre que partager des photos de nos enfants sur les réseaux sociaux n’a pas grand-chose à voir avec le fait de montrer un album photo à de vrais amis dans un contexte privé.

Oui, ça peut sembler prise de tête, mais partager des photos de ses enfants sur le net peut être lourd de conséquences. La première, et la plus grave : trahir la confiance de notre enfant.

Vous n’aimeriez pas que votre enfant poste, sans vous le dire et sans votre consentement, une photo de vous en « tenue d’Adam », parce qu’il ou elle vous a surpris au saut du lit ou aux toilettes ?

Et pourtant, combien de parents n’hésitent pas à poster des photos de leurs enfants nus ou simplement sur le pot ? Que les enfants soient encore petits et mignons ne change rien : ils ont droit à une vie privée, ils ont droit aussi au respect de leur dignité. Votre enfant vous fait confiance et vous laisse accéder aux moindres recoins de son quotidien: il est essentiel de respecter cette confiance et de ne pas la décevoir.

Des questions à se poser avant de cliquer

Vacances, fêtes, anniversaires et Noëls, rentrée des classes… Il est tentant de poster des photos de nos enfants sur notre profil en continu. Mais avant de cliquer « Partager », il est indispensable de se poser quelques questions:

  • Qui aura accès à ces données ? Mon enfant est-il facilement reconnaissable ? La scène capturée qui me semble sympathique aujourd’hui peut-elle lui porter préjudice dans l’avenir, ou bien tout simplement lui occasionner de la gêne?
  • Lorsque vous posterez cette photo, qui va la voir ? Si la réponse est « mes amis Facebook», ces amis Facebook sont-ils de vrais amis proches, ou de très vagues connaissances que vous avez croisé une fois ou deux il y a deux ans, des gens que vous ne souhaiteriez pas forcément revoir ?

Lorsqu’ils sont plus âgés, on peut leur demander leur consentement explicite. Juste parce que vous êtes leur parent ne veut pas dire que vous pouvez faire ce qu’il vous plaira de leur photo. Il est bon de leur poser la question « Es-tu d’accord pour que je poste cette photo sur mon Facebook / Snapchat / Instagram? » Les associer à la démarche ne peut que renforcer votre confiance réciproque et vous permet de participer activement à leur “éducation numérique”.

Du plus rare au plus répandu, les risques sont pourtant très réels

Certes, on pourrait vous faire peur en vous racontant qu’à terme vos photos de vacances peuvent se retrouver sur un site de pédopornographie. Cela s’est passé en Australie, où un commissaire à la sécurité électronique pour les enfants a retrouvé 45 millions de photos d’enfants sur un site pornographique.

Ces photos avaient été prises sur les réseaux sociaux. Il s’agissait souvent de photos complètement innocentes, des photos de famille sur lesquelles les enfants étaient habillés, occupés par exemple à faire leurs devoirs ou à jouer. Mais les commentaires qui accompagnaient les images étaient clairement à caractère pédopornographiques.

On peut mentionner aussi en passant la pratique du “kidnapping numérique” : un étranger récupère les données de votre enfant (photos, âge, école, voire adresse…) pour créer un faux profil. Avec ce faux profil, il peut “jouer à la poupée” (ce qu’on appelle “fantasy roleplay”), et se mettre en scène sur les réseaux sociaux en inventant par exemple une personnalité à l’enfant autour des photos récupérées.

Pas forcément dangereux, mais quand même très étrange voire carrément malsain !

 

Cependant, le pire qui puisse se produire est aussi le plus fréquent, et le plus probable : que vos enfants se sentent trahis et humiliés à plus long terme, lorsqu’ils se rendent compte que vous avez partagé des photos d’eux sans leur accord lorsqu’ils étaient plus jeunes, et dans des postures ou des situations qui aujourd’hui les dérangent ou leur occasionnent de la gêne.

Les enfants 3 fois plus plus inquiets que les parents sur les pratiques … des parents

 

En 2016, une étude américaine portant sur 250 familles a montré que les enfants entre 10 et 17 ans s’inquiètent de la façon dont leurs parents partagent leurs photos en ligne. Les enfants étaient trois fois plus nombreux à s’en inquiéter que leurs parents.

Dans un article du New York Times qui reprenait les résultats de l’étude, plusieurs parents racontaient que leur enfant cache spontanément son visage ou sort de la pièce lorsqu’un adulte prend son téléphone portable pour prendre une photo ou filmer.

N’est-il pas tragique de risquer de perdre la confiance de son enfant / adolescent, juste pour avoir fait rire quelques amis et obtenu quelques likes ?

Beaucoup d’adultes ne cessent de critiquer les comportements numériques des enfants et réclament à juste titre “l’éveil de leur esprit critique” : cet esprit critique, peut-être devrions-nous également en faire preuve…

 

Des photos partagées par des parents qui ne connaissent RIEN à la confidentialité

 

Une étude réalisée en 2016 au Royaume-Uni a révélé qu’en moyenne, les parents postaient 1500 photos de leur enfant avant son cinquième anniversaire. 1500 photos en 5 ans…

La même étude révélait que, dans presque la moitié des cas, ces parents n’avaient aucune idée de leurs paramètres de confidentialité, et ne savaient pas comment les régler…

Un quart des parents interrogés dans l’étude ont eu tout faux à un quiz portant sur la confidentialité de leurs posts (10 mauvaises réponses sur 10 questions).

85% des parents n’avaient pas vérifié leurs paramètres de confidentialité depuis plus d’un an !

Un tiers des parents étaient forcés d’admettre que, même si les photos sur leur profil Facebook étaient visibles seulement par leurs « amis Facebook », plus de la moitié de ces « amis » n’étaient pas des amis proches, ni même des personnes qu’ils connaissaient bien !

Et seuls 16% des parents avaient demandé la permission de leur enfant avant de poster une photo.

 

 

Oui, nous aimons nos enfants, nous sommes fiers d’eux, ils grandissent trop vite et nous voulons montrer à tout le monde comme ils sont beaux. Mais si on réfléchit un peu, dans quelques années, que penseront-ils de voir leur vie intime exposée à la vue de tous par ceux qui n’ont eu de cesse de leur répéter toute leur adolescence : « réfléchis avant de publier tes infos sur les réseaux ! »